La France de Nicolas Sarkozy

Publié le : 26 novembre 20159 mins de lecture

La France que propose le candidat de l’UMP : un pays divisé, un corps social réduit à une somme d’individus en concurrence et en lutte les uns contre les autres.

La France qu’il dépeint : celle de la méfiance et de la division

Le discours politique de Nicolas Sarkozy se fonde sur une exacerbation des différences entre les Français. Il dresse les Français les uns contre les autres. Il n’y a pas une France mais plusieurs France, des bons Français et des mauvais Français, responsables évidemment de tous les maux.

« Français de souche » contre « pièces rapportées »

Pour Nicolas Sarkozy, l’étranger ou l’immigré, même naturalisé ou né en France, est un éternel suspect, jamais assez francisé. L’étranger, c’est le Noir ou l’Arabe, réduit à un amalgame de clichés douteux :

«Ceux qui veulent soumettre leur femme, ceux qui veulent pratiquer la polygamie, l’excision ou le mariage forcé, ceux qui veulent imposer à leurs soeurs la loi des grands frères, ceux qui ne veulent pas que leur femme s’habille comme elle le souhaite ne sont pas les bienvenus sur le territoire de la République française.» (Discours de Poitiers).Lors de l’émission « J’ai une question à vous poser » sur TF1 le 5 février dernier, Nicolas Sarkozy fait mention des «agneaux égorgés dans les appartements», provoquant d’ailleurs l’indignation d’une jeune femme de parents algériens (faisant partie du panel) C’est une manipulation raciste en bonne et due forme car l’abattage des agneaux consacrés est légalement organisé en France.

La France « qui se lève tôt » contre celle des assistés et des fonctionnaires

Il y a aussi deux France du point de vue socio-économique, selon Nicolas Sarkozy, qui oppose fréquemment le travailleur vertueux à toutes les catégories d’assistés et de privilégiés (fonctionnaires, grévistes, chômeurs). Sa rhétorique est simple : ce sont précisément les assistés et les salariés protégés qui sont responsables de la chute du pouvoir d’achat.

«Il est temps de parler vrai, la solidarité c’est pour aider ceux qui veulent s’en sortir, pas pour protéger ceux qui ne font rien» (« La France dans la Mondialisation, Saint-Étienne, 9 novembre 2006).Les fonctionnaires sont souvent montrés du doigt comme trop privilégiés : «Il y a une nouvelle forme d’inégalité dans notre pays : c’est celle qui sépare les salariés du secteur public, protégés dans leur emploi, des salariés du secteur privé, menacés par le chômage, les délocalisations, la tertiarisation de l’économie qui exige plus de mobilité» (Convention UMP sur les injustices, « Un avenir pour tous dans une société plus juste », 30 novembre 2005) Aider les Français qui sont dans le besoin, c’est pénaliser les « méritants » ; il faut au contraire aider ceux qui vont déjà bien !

La recherche des « boucs émissaires »

Comme tous les populistes, Nicolas Sarkozy donne, pour chaque problème, un bouc émissaire dans la population. Ainsi les juges sont-ils responsables des dysfonctionnements de la justice et de la sécurité. Dans la France de Sarkozy, autrui est un danger pour moi. Les Français sont incités à se replier sur leur groupe social ou religieux, et à rejeter sur les autres groupes la responsabilité de leurs problèmes.

La France qu’il défend : celle des possédants

En vérité, et quoi qu’il en dise ou essaie de faire croire par ses incantations à Jaurès et à Blum, Nicolas Sarkozy n’est pas le candidat des travailleurs, mais bien celui des possédants et des fortunés, qu’il prévoit de protéger et de privilégier par toute une série de mesures. C’est le retour de la droite dure et conservatrice du XIXème siècle.

L’avenir des travailleurs et des salariés : une précarisation encore accrue

Il faut casser le droit du travail, qui entrave les entreprises :

«Notre droit du travail qui décourage l’embauche sans protéger du chômage est une régression sociale» («Pour la France qui souffre» Charleville-Mézières, lundi 18 décembre 2006)Fort logiquement, CPE et CNE devraient donc servir de modèle au nouveau contrat de travail, et la flexibilité du salarié devenir la règle : «Le CNE est un progrès, il ne faut pas y toucher… Le contrat de travail unique inspiré du CNE est une occasion de simplifier beaucoup le droit du travail français.». (Rencontre organisée par des patrons de PME, le 24 janvier 2007).

Son projet pour les propriétaires et les Français les plus aisés : moins d’impôts, et plus de patrimoine.

Nicolas Sarkozy propose un projet fiscal et économique clientéliste, visant à satisfaire tout d’abord les plus aisés, les détenteurs de patrimoine. C’est la négation de la solidarité qui est au fondement de notre modèle social.

Il compte mettre en place des réductions d’impôts profitables pour les plus riches : « Je veux un bouclier fiscal à 50% y compris la CSG et la CRDS » (Discours d’investiture, 14 février 2007).Nicolas Sarkozy ne veut pas non plus lutter contre les inégalités trans-générationnelles, mais au contraire favoriser les privilèges familiaux acquis, en supprimant l’impôt sur les successions.Nicolas Sarkozy ne veut pas réhabiliter le travail et les travailleurs, mais protéger la rente, le capital et la reproduction sociale. Il veut rompre avec le modèle social français, durement acquis tout au long du siècle dernier, en particulier par l’action des grandes figures socialistes qu’il ose invoquer !

La France qu’il prépare : celle du conflit permanent

À vouloir dresser les Français les uns contre les autres, tout en soutenant éhontément les intérêts d’une minorité, Nicolas Sarkozy va faire de la France un pays de conflits et de désordre social et politique. Ceci se comprend aussi bien à l’aune de son projet que de son bilan.

Dans le monde du travail

Nicolas Sarkozy est décidé à s’attaquer au droit de grève par tous les moyens, et le plus vite possible, alors même qu’il prétend vouloir gouverner en concertation avec les syndicats : «Je veux poser la question du vote à bulletin secret dans les entreprises, les universités, les administrations au bout de huit jours de grève». (Interview dans les Echos, 14 février 2007).

Dans les banlieues

Durant son mandat de Ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy s’est souvent comporté de façon brutale, en parfaite contradiction avec la retenue que requiert un tel poste. Il ne faut pas oublier le rôle joué par son vocabulaire (« karcher », « racaille ») dans l’embrasement des banlieues, rôle qui ne le conduisit pourtant jamais à se repentir.

Selon le «Le rapport au politique dans les zones urbaines sensibles après la crise des banlieues» -, réalisée par le Centre d’études de la vie politique française (Cevipof), associé à la Sofres en novembre 2006, 52% des 2.039 banlieusards interrogés affirment que ce sont «les propos de Nicolas Sarkozy» qui ont le plus lourdement contribué aux émeutes de novembre 2005. La télévision a ensuite « facilité l’escalade », pour 44,5 % des sondés. Le « harcèlement et les violences de la police » ne viennent que très loin derrière (25 %), de même que le « rôle des mafias » qui défendent leur petit commerce contre les « bleues » (20 %).

Avec l’opposition

Nicolas Sarkozy a des mots très durs et à la limite de la diffamation envers ses adversaires politiques de gauche, là encore contraires à la volonté d’apaisement qu’on serait en droit d’attendre de l’homme d’État qu’il prétend être.

Incapable de concevoir l’action politique autrement que comme coups de main et passages en force, Nicolas Sarkozy risque de semer le désordre, l’injustice et l’inégalité s’il parvenait à se faire élire à la tête de notre pays.

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